Bertrand Noeureuil nouveau chef au restaurant du Gabriel à Bordeaux, après le palace Cheval Blanc à Paris, L’observatoire en route vers le sommet de la gastronomie bordelaise.
En novembre, je conversais avec mon voisin de jury au concours des Parcours du Goût et je lui demandais innocemment quelle était la table à suivre en 2024 à Bordeaux. Nicolas Masse, deux étoiles Michelin pour la Grand’Vigne me glissait à l’oreille qu’il fallait d’urgence retester le Gabriel où Bertrand Noeureuil, l’ancien bras droit d’Arnaud Donckele trois étoiles à Cheval Blanc Paris, venait de débarquer.
Cette recommandation a piqué ma curiosité et mon envie d’enrichir mon guide des meilleurs restaurants de Bordeaux. J’ai profité de la proximité des fêtes pour offrir à mon homme un Noël en Duo. Aujourd’hui, je partage avec vous mon ressenti, mes émotions et mon plaisir à découvrir une cuisine contemporaine de haute volée dans un lieu chargé d’histoire, le Gabriel.
Le Gabriel, restaurant multiple au cœur de la place de la Bourse
L’adresse se dresse fièrement au centre de la place de la Bourse, une merveille architecturale du XVIII, conçue à la gloire de Louis XV par l’architecte Jacques Gabriel. Les bâtiments organisés en demi-cercle font face à la Garonne, offrant aux convives une perspective à cent quatre-vingts degrés sur le fleuve, l’iconique Pont de Pierre et la caserne de la Benauge.
Bien que l’ensemble impressionne le visiteur, l’animation liée au passage des tramways dédramatise les lieux. En arrière-plan, sur les quais, le miroir d’eau inauguré en 2006 apporte une touche joyeuse et populaire à l’endroit. Devenue une attraction incontournable, il offre un terrain de jeu aux touristes et aux Bordelais qui s’y photographient, y dansent, et s’y rafraîchissent en été au contact de l’eau et de la vapeur.
Le Gabriel, installé au centre de la place, participe au prestige du lieu. Avec son offre multiple, bar à cocktails, bistro et restaurant gastronomique en étage, il propose de vivre une expérience unique au cœur du Bordeaux classique.
La salle à manger de L’Observatoire : ambiance bourgeoisement raffinée.
Le luxe accessible se décline avec élégance dans la salle à manger de L’Observatoire, où la sobriété règne en maître avec des teintes de beige et de rosé. Les magnifiques volumes de la salle et les ouvertures offrant une vue sur la place de la Bourse, font de cet endroit le seul restaurant gastronomique bordelais avec une perspective sur la Garonne. L’atmosphère feutrée et bourgeoisement raffinée, imaginée par Stéphanie de Boüard-Rivoal, propriétaire de l’établissement et du prestigieux Château Angélus à Saint-Émilion, invite les convives à s’installer confortablement pour un dîner mémorable.
Le Menu du Chef Bertrand Noeureuil
Nouveau chef titulaire, Bertrand Noeureuil a conçu son menu avec l’envie de sublimer son terroir et les produits de la ferme 1544, le potager propriété du restaurant étendu sur neuf hectares à Saint-Loubès. Du début à la fin du repas, le chef met l’accent sur les produits locaux d’excellence, mettant en valeur leur fraîcheur. Des amuse-bouches au dessert, le voyage culinaire nous a transportés dans une expérience gustative authentique, où la subtilité des saveurs témoigne d’un maîtrise des cuissons, des sauces et des jus.
Les assiettes participent au plaisir de la dégustation. Visuellement, le travail du chef séduit par une belle alternance de proposition. Il peut se limiter à deux couleurs comme le vert et blanc de sa première entrée ou bien faire exploser la joie par un feu d’artifice dans sa « palette de légumes Ciron en papillote vivifiés d’une vinaigrette au Sauternes »
D’une apparente simplicité, les recettes cachent un gros travail en amont, une recherche de perfection, la suite logique d’un long cheminement avec les chefs les plus capés de France, à l’image d’Arnaud Donckele, chef en titre de Chaval blanc Paris, trois étoiles Michelin, d’où nous arrive Bertrand.
Le souci du détail transparait aussi dans l’énoncé des plats. Biscuits d’esturgeon « cousinète », Gougeonnettes de sardine Chambrelent ou feuilleton de veau Valencienne », il est fait référence à des termes de la grande cuisine classique française comme à des recettes traditionnelles oubliées telle cette cousinète, une soupe de légumes verts type épinard, oseille ou bette, métamorphosée ici en jus d’herbes du jardin.
Arrêtons-nous sur les Amuse-bouches, un apéritif végétarien autour des produits de la ferme 1544 composé de délicates bouchées :
- Oignon farci d’une crème et d’un jus de cuisson réduit.
- tartelette fine garnie d’une duxelle de champignons de Paris provenant de la champignonnière du domaine à de Saint Émilion, champignons slicés on top.
- tartelette crème double parfumée à la noix de muscade et gelée au miel de châtaigne et vinaigre de pollen, chips de châtaigne on top.
On pourrait revenir sur tous les autres plats, mais pour ne pas tout dévoiler, pour garder un peu de mystère, je vous propose d’évoquer avec vous ceux qui m’ont particulièrement émue.
Le premier service nous a donné les cartes pour comprendre la philosophie cuisine du chef Bertrand Noeureuil. Son entrée, un biscuit d’esturgeon cousinète, herbes potagères et caviar d’Aquitaine fait la synthèse entre la référence à l’histoire de la cuisine, la recette du jus d’herbe, la recherche d’ingrédients de proximité, les herbes de la ferme 1544 et le luxe en petite touche : les perles de caviar d’Aquitaine.
Le jus est versé à la table, service gastronomique, l’assiette ravit l’œil, la dégustation nous comble d’un vrai bonheur iodé mâtiné de chlorophylle.
La viande, un feuilleton de veau Valencienne en casserole nous a séduit par la justesse de la cuisson qui garde le veau tendre et délicat et par la gourmandise de sa sauce, un jus déglacé au vin de noix et enrichi d’une réduction d’échalotte à la liqueur de noix.
La liste de nos petits bonheurs du jour serait incomplète si je ne citais les mignardises, une collection de desserts régressifs qui ont tant fait plaisir à mon homme puisqu’on lui a servi son dessert favori : l’île flottante. D’autres surprises attendent les convives comme l’intermède Chabrot au vin de noix, une vieille tradition Bordelaise revisitée par le chef et dont je tairai le bonus.
Je m’arrêterai ici pour les commentaires de dégustation, pensant vous laisser découvrir par vous-même le menu et donne la parole au chef qui m’a fait la gentillesse de répondre à quelques questions dont je vous livre ici l’essentiel.
Entretien avec le chef Bertrand Noeureuil
Sophie Juby : La cuisine et toi c’est une histoire qui débute comment ?
Bertrand Noeureuil : Attiré par le design, je suis entré en apprentissage cuisine un peu par défaut même si mes grands-parents qui habitaient en campagne m’avaient transmis le goût du produit. La passion est venue avec la connaissance et ne m’a plus quitté.
3 dates à retenir de ton parcours culinaire ?
- 10/06/2019 Début du projet Plénitude, Cheval Blanc Paris
- 9/01/2021 rencontre avec ma femme Chloé
- 22/03/2022 Michelin décerne la troisième étoile au restaurant Plénitude.
Ton modèle en cuisine, ton mentor ?
Je n’ai pas un mais trois modèles. En premier le binome chef Daniel et chef David du restaurant saveurs à Toulouse, en second Yannick Alleno et enfin Arnaud Donckele avec qui j’ai de suite accroché et dont je partage la vision cuisine. Nous avons collaboré dans une relation équilibrée entre le dialogue et le respect. Il me manque parfois…
Quelle est ton idée de la cuisine, ton envie quand tu te mets aux fourneaux ?
Je pratique une cuisine saucière toute en fraîcheur et légèreté comme celle du dessert qui s’apparente à une tisane.
Quand je me mets au fourneau, je pense à mes clients. J’aimerais leur plaire, les rassurer en jouant sur leurs souvenirs gustatifs.
Une saveur d’enfance, un parfum que tu n’oublies pas ?
Je croque dans un Kumquat et je revois la terrasse de ma grand-mère à Nice. De mon enfance, je garde le goût des agrumes et je trouve dans le kumquat le fruit parfait qui combine sucrosité, amertume et saveurs acidulées.
Une fois ces éléments exposés, il reste beaucoup à dire concernant le projet du chef pour le Gabriel. En parallèle de son engagement au sein du restaurant gastronomique, Bertrand Noeureuil supervise désormais le Bistro 1544 où Il entend décliner ses créations avec la vision d’une cuisine réconfortante et raffinée qui célèbre les saveurs du terroir, avec des plats nostalgiques revisités, tels que sa irrésistible viennoise de veau, accompagnée d’une burrata exquise et d’une cocotte de légumes du moment.
A l’entendre évoquer ses plats, ses entrées mimosa et gnocchis aux champignons, il m’est venu des envies de retourner au Gabriel. Pour les amateurs de cuisine délicate mettant en avant le végétal et s’inspirant du patrimoine culinaire, L’Observatoire du Gabriel entre dans la short list des meilleurs restaurants à Bordeaux. Comme me le suggérait son éminent collègue, je pense que l’adresse sera à suivre de très près en 2024.